« Vendôme, j’achète ! »
Le jeudi 4 février 2021, le groupe de luxe LVMH a signé, pour 10 000 € un accord avec la ville de Vendôme pour s’offrir le droit exclusif d’utiliser la marque Vendôme pour « toute création de collection et de produits liés à la joaillerie et à l’horlogerie ».
Et l’on découvre ainsi que le nom d’une ville peut être racheté par le plus grand groupe de luxe au monde. On s’était posé la question de la privatisation de l’espace public au moment de l’incendie de Notre-Dame de Paris et l’élan de générosité des milliardaires français.
Certains auteurs de science-fiction, comme Alain Damasio dans son dernier livre, « Les Furtifs », prédisent, après les stades, la vente des villes aux grandes marques… Cannes, par exemple, rachetée par la Warner, Orange par Orange, Lyon la capitale de la gastronomie, rachetée par Nestlé et qui deviendrait Nestlyon. Et bien sûr, Paris la Ville lumière, la ville du chic français rachetée par LVMH et rebaptisée Paris LVMH.
Avec Vendôme, il ne s’agit pas d’une opération ponctuelle comme Citroën l’a fait avec la C4 Picasso. Citroën avait le droit d’utiliser la marque mais n’en était pas propriétaire. Non, dans le cas de Vendôme, il s’agit d’une cession définitive à une très grande multinationale pour 10 000 euros, ce qui paraît dérisoire, comparé au chiffre d’affaires de LVMH en 2020, soit 44,7 milliards d’euros.
En fait, LVMH n’achète pas uniquement le nom de la sous-préfecture du Loir-et-Cher. Mais sept lettres, dont une accentuée, qui évoquent bien évidemment la quintessence du luxe : la place Vendôme à Paris. Les plus grandes maisons de haute joaillerie ou de mode y ont une boutique. Cartier, Boucheron, Dior, Chanel, Van Cleef & Arpels, Louis Vuitton… et l’hôtel Ritz Paris en prime. C’est ce Vendôme là qu’achète Bernard Arnault. C’est ce nom qu’il privatise. C’est du billard à trois bandes. Et l’histoire ne s’arrête pas là. Ce n’est que l’un des maillons de la stratégie élaborée.
En parallèle de l’achat du nom de la ville, LVMH a restauré pour plus de 15 millions d’euros, l’ancienne abbaye du quartier Rochambeau pour y installer le pôle d'excellence des cuirs précieux de Louis Vuitton. Ce qui lui permet d’ancrer physiquement le bâtiment classé dans l’historique du Groupe. Et à n’en pas douter, cette abbaye va devenir un lieu de « pèlerinage » à la gloire des produits Vendôme.
Vendôme - LVMH - La place Vendôme. La boucle est bouclée et Bernard Arnault suit les pas du Roi-Soleil. Car pour l’anecdote, c’est Louis XIV qui racheta l’ancien hôtel particulier parisien du duc de Vendôme avant de le raser pour en faire la place Vendôme.
« Et si demain, LVMH rachetait Versailles, ça ferait un bel écrin pour le luxe français, non ? »