« Nains de jardin : ouvrez les conteneurs ! »
Pas sûr que les experts, qui ont réponse à tout sur les plateaux des chaînes d’info, aient vu venir ce problème de pénurie. Au Royaume-Uni, les confinements successifs ont eu, comme conséquence, un développement sans précédent de l’activité dans les jardins.
Les Anglais se sont rués dans les jardineries et n’ont pas trouvé les décorations extérieures qu’ils aiment tant. Dans certains magasins, un produit est même en rupture de stock depuis des mois : le nain de jardin.
L’épisode du mois dernier, où un porte-conteneurs géant a bloqué le trafic de marchandises dans le canal de Suez, n’a rien arrangé. Les livraisons d’accessoires de jardin made in China ont été retardées de plusieurs semaines.
Depuis le XIXe siècle, les Britanniques adorent ces petits bonshommes joufflus que l’on place sur la pelouse fraîchement coupée. En Allemagne également, on compterait de 20 à 25 millions de nains de jardin. En plastique, en pierre ou en céramique. Depuis 1937 et “Blanche-Neige et les Sept Nains”, le premier long métrage d’animation des studios Disney, d’après le conte des frères Grimm, c’est un succès considérable en Europe, « Hé ho, hé ho, on rentre du boulot ! ». Sans oublier le film “Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain”, en 2001, où un nain de jardin volé voyageait mystérieusement autour du monde.
Il y a vingt-cinq ans, c’est en France, à Alençon que les nains avaient disparu. Des centaines de nains volé, la nuit, dans les jardins. La police enquêta et commença à prendre au sérieux ces disparitions. Et puis coup de théâtre, les nains sont retrouvés, regroupés tous ensemble en plein milieu d’une forêt voisine… avec des vivres pour pouvoir tenir quelque temps !
Le FLNJ, le Front de Libération des Nains de Jardin, revendique ces enlèvements. On découvre alors un commando de jeunes qui s’ennuient ferme. « Les nains, ça se cueillait comme des fleurs ! On s’est pris au jeu dès que les médias se sont intéressés à nous. »
De nombreux propriétaires de nains ont très mal vécu ces vols qui, d’une certaine façon, les stigmatisaient socialement. Le nain, c’est pour beaucoup le mauvais goût du modeste pavillon. Aujourd’hui, à Alençon, on protège les nains. « Depuis les vols, tous les soirs, on les rentre dans le garage et on les sort le matin. Nous, on en a une quinzaine. »
Avec la pandémie, certains ont trouvé dans le nain de jardin, une forme de réconfort et de protection. Un rayon de soleil au milieu de la morosité. Un nain apporterait bonheur et joie dans la famille qui l’accueille. Car on ne parle plus d’achat pour un nain, mais d’adoption !
Il est donc grand temps, pour nos amis britanniques, d’aller libérer les nains retenus dans les conteneurs.