Le bio, c'est bon. Vraiment ?
Roulements de tambour, trompettes, paillettes et projecteurs : le bio est la star du moment. On ne parle, on ne jure plus que par le bio.
Déferlante du bio qui n’est plus réservé aux bobos fréquentant les enseignes spécialisées, non, aujourd’hui, plus de la moitié des ventes de produits bio se font en grandes surfaces.
Sauf qu’au supermarché, au rayon bio, on s’est tous posé la question devant un légume plastifié : « Et les mecs, rassurez moi, les courgettes ne sortent pas de terre recouvertes d’un préservatif, non ? Je fais l’effort d’acheter du bio et je me retrouve avec un emballage ou une barquette plastique, tout ça pour différencier le légume bio du non bio en libre service ! ».
Autre confusion sur les conditions de production du bio. « Je vais te dire, moi, quand j’achète des tomates bio, c’est un peu comme si je parlais avec le paysan de l’Aveyron qui les choisit pour moi… Et puis tu vois, la terre sur la tomate, c’est celle d’un jardin, d’un vrai jardin comme celui que ma grand-mère entretenait dans le Berry… Je sens que je fais un truc bien pour le paysan producteur, je fais un truc bien pour la planète. J’ai même l’impression d’être un peu militant, en achetant mes tomates à 12 euros le kilo. Je vote écolo, je mange bio… et tu vas trouver ça excessif, mais je me sens dans la peau du Jean Moulin de la résistance bio. »
Sauf que de partout, la demande explose, et il faut produire encore et toujours plus pour satisfaire le citadin et ses envies de nourriture saines. Et c’est là qu’on découvre que le bio, ce n’est pas que dans l’Aveyron ou le Berry, c’est même surtout beaucoup plus loin, très loin. Au Maroc, en Espagne où l’on a recouvert de serres des milliers d’hectares pour produire du bio toute l’année. Quitte à chauffer les cultures l’hiver et à éclairer quand la lumière zénithale n’est pas suffisante.
Bio, ça ne veut pas dire éthique. En Espagne, ce sont souvent des conditions de travail dégradées pour les milliers de saisonniers qui viennent des quatre coins du monde. L’industrie agroalimentaire, à l’odeur alléchée, s’est engouffrée dans la brèche comme le loup dans le bergerie. Certains parlent même d’agriculture bio industrielle.
A l’image de certains élevages bio de poules pondeuses qui respectent les directives européennes permettant l’attribution du précieux label. Espace pour chaque gallinacé, qualité du sol, nature de la ration alimentaire. Sauf que rien n’est précisé sur le nombre de volatiles… et l’on se retrouve, en Italie par exemple, avec des élevages certifiés bio, de plus de 100 000 poules. Bien loin de l’éleveur de l’Aveyron qui nourrit avec attention ses poules au maïs régional, pour avoir une belle couleur de jaune.
La prochaine étape, ça va être de s’attaquer au problème du trop. Le trop de tout. Alors, si on mangeait moins pour mieux manger ?