Blablabla le colibri
On en était resté à la légende amérindienne du colibri racontée par l’essayiste et romancier Pierre Rabhi. Du tout petit oiseau qui, au milieu d’un feu de forêt, apportait une goutte d’eau dans son bec. Et le tatou de lui dire : « Mais ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre les flammes ! » Et le colibri de lui répondre : « Oui, je sais, mais je fais ma part ! » On doit bien l’avouer, on trouvait tout cela plein de bon sens.
L’autre jour, on tombe par hasard sur une interview du chanteur Julien Doré qui répondait à une journaliste de France Bleu Gard Lozère. « Alors Julien, c’est quoi votre petit geste du quotidien, pour sauver notre planète ? »
Et l’on se dit que le chanteur au tatouage d’épaule “Jean d’Ormesson” va sans doute évoquer notre histoire de colibri, la fable, tant de bienveillance, « ma goutte d’eau à moi »… sauf que non, pas du tout !
« Je pense que le cynisme, il se situe exactement là. C’est-à-dire que mon petit geste quotidien, on s’en fout ! L’idée, c’est simplement de se dire que pour la plupart des systèmes politiques de notre époque et dans de nombreux pays qui auraient la possibilité de changer les choses, eh bien, les choix qui sont faits par ces gens qu’on a choisis sont axés sur le fait de nous culpabiliser, nous, au quotidien, et de nous dire d’une certaine façon que c’est précisément la faute de chacun des individus, si nous en sommes là et si nous ne pouvons rien faire. »
Alors, on se dit que la belle histoire du petit oiseau a du plomb dans l’aile. Qu’effectivement, dès que l’on réfléchit un tout petit peu, on constate que les États inactifs se dédouanent largement de leurs responsabilités, pour mettre la pression sur les citoyens. « Non, mais là, faut vraiment penser à la gourde. Les bouteilles en plastique, c’est juste plus possible ! »
Plutôt que de légiférer pour changer le système et le réguler, les États culpabilisent les individus, tout en laissant le champ libre aux véritables pollueurs de l’environnement. « Hé, dis donc, toi, tu ne débranches pas ta box quand tu pars en week-end ? Tu sais que ton comportement détruit la planète ! »
Greta Thunberg ne dit pas autre chose, elle ne demande rien aux citoyens, mais accuse avec force et arguments les gouvernements de ne rien faire. « Rien, vous ne faites rien, que du blabla… des mots qui sonnent bien, blablabla. » Le capitalisme ultralibéral épuisera la planète jusqu’au bout, c’est sa nature.
On avait commencé, ce week-end, à construire un bac à compost pour les épluchures, on va peut-être penser à descendre dans la rue.