Avoir 20 ans en 2020
Quand on a 15 ans, on s’impatiente d’en avoir 20. Passé la cinquantaine, c’est parfois la nostalgie qui domine. Mais avoir 20 ans, à l’ère de la Covid-19, c’est autre chose.
Les années 1970 prônaient la liberté de parole, la liberté de disposer de son corps, la liberté d’exister et de s’épanouir dans une société bourgeoise sclérosée qui avait connu la guerre et les privations. Cette société ne laissait que peu de place à une jeunesse qui étouffait et qui voulait « jouir sans entrave », qui voulait « interdire d’interdire ».
Aujourd’hui, cette génération a 70 ans. L’esprit jeune, elle profite de sa retraite.
Mais, cet hiver, un virus a traversé la planète comme une traînée de poudre. Touchant principalement les plus âgés et les plus fragiles. Alors, pour les protéger, la France a été “confinée” au printemps. Concrètement, on a interdit aux jeunes gens de vivre pour que les vieux ne meurent pas.
C’était le prix à payer. Plus de fêtes nocturnes, plus de festivals, plus de discothèques, plus de bars, plus de contacts. En mai, lors du déconfinement, les étudiants n’ont pas retrouvé leurs établissements, alors que la société reprenait vie. Les cours à distance ont été instaurés. Toute une génération a dû se comporter comme si elle était malade.
Et cela est allé plus loin encore. Cursus suspendus. Erasmus à la trappe. Plus de stages de fin d’année, plus de petits boulots pour payer les études, plus de jobs d’été. La précarité dans le monde étudiant s’est installée. Mais tout ça n’était qu’une première étape.
Aujourd’hui, les banques sont de plus en plus frileuses pour octroyer des prêts étudiants. Les entreprises ont la tentation de ne proposer que des salaires à la baisse. Plus d’emplois durables.
Même la tenue vestimentaire pose problème. « Pas de crop top à l’école ! » D’aucuns affirment, en effet, que ce n’est pas une “tenue républicaine” !
En quelques mois, et sans le dire ouvertement, la société française semble avoir fait le choix de sacrifier une génération entière au profit d’une autre en fin de course.
Tout le monde perçoit bien qu’en ce début d’automne, l’horizon reste incertain. Les masques tombent, certains craignent un conflit de génération qui serait catastrophique.
« La deuxième vague de Covid-19 qui se profile, c’est à cause des jeunes, ils font n’importe quoi ! » entend-on. Mais jusqu’où les jeunes seront-ils prêts à se sacrifier ?
Cinquante ans après, les filles et les garçons de 20 ans ne demandent pas l’impossible, loin de là : ils souhaitent juste pouvoir vivre leur âge. Raisonnables en somme !